Quelques notions autour de la transition

Soit un monde, le nôtre, dont les principes organisateurs cessent peu à peu de fonctionner comme auparavant sous la pression :
  • de tendances lourdes, sur lesquelles nous n’avons guère d’influence à horizon visible : le changement climatique, l’épuisement de nombreuses ressources naturelles, le vieillissement de l’Occident et d’une partie de l’Asie...
  • de tensions internes que nous ne savons plus contenir : l’explosion des inégalités, l’ingouvernabilité de la finance,le poids des économies mafieuses, la recherche parfois violente de sens, de certitudes et d’appartenance...
  • d’innovations et de pratiques émergentes qui, en s’étendant et s’agrégeant, finissent par substituer leurs mécanismes nouveaux aux anciens : pour ne parler que d’eux, le numérique et ses pratiques subvertissent à la fois les règles de l’économie de marché (rendements croissants, effets de réseaux,‘communs’...) et celles des modèles administrés (horizontalité, transparence, ouverture...).
Ce monde n’a d’autre issue que de changer.
Nous venons de décrire une transition, avec tous ses ingrédients
un système complexe => un état de départ rendu instable par des changements venus de l’intérieur comme de l’extérieur => et son passage vers un nouvel état significativement différent du précédent, en empruntant un chemin de transformation plus ou moins long, escarpé et incertain.

ALORS, ON FAIT QUOI ?

  • On tente de faire mieux à la prochaine conférence internationale ? Les résultats des 20 précédentes éditions n’invitent pas à l’optimisme...
  • On anticipe le pic pétrolier et le changement climatique en se repliant sur l'arrivée hypothétique d'une solution miracle ?
  • On réduit la taille du problème pour passer de l’échelle de la Planète à celle d’une ville, d’un réseau, d’un marché, d’une grande entreprise ?
  • Ou encore, on regarde autour de nous, à la recherche de forces suffisamment puissantes pour produire des changements majeurs dont le système a besoin ?

CONTRE LE FATALISME ET LE DÉTERMINISME, LA PROSPECTIVE POUR PENSER ET ENGAGER DES CHANGEMENTS

Parce que c’est maintenant et pas dans 10 ans...
  • que l’action publique doit se coproduire avec les citoyens,
  • que l’École doit se reconnecter à la pulsation du monde,
  • que la santé doit devenir sociale, préventive et holistique,
  • que les territoires doivent réécrire un récit collectif à la fois frugal, inclusif et désirable -> que les entreprises doivent redevenir un lieu d’épanouissement pour les gens,
  • que la recherche..., que les médias..., que la démocratie..., que la ‘culture’..., que les mobilités..., que l’Europe..., que...

Les démarches prospectivistes peuvent largement soutenir ces dynamiques de changement.

MINI-GLOSSAIRE DES TRANSITIONS

Transition : Dans un dictionnaire, une transition désigne d’abord l’action de passer d’un état à un autre
La transition intervient en réponse à un problème persistant (ou un ensemble de problèmes) à l’échelle du système, dont les symptômes deviennent de plus en plus apparents et qui est : complexe ; profondément enraciné ; difficile à appréhender ; difficile à gérer du fait de la pluralité des acteurs concernés ; incertain.
Dès lors que le système ne peut plus se maintenir en l’état, même en s’adaptant, la transition s’engage.

Dans la mesure où la transition concerne un système complexe, elle intervient à plusieurs échelles et dans plusieurs domaines à la fois :
  • Les structures : physiques, économiques, institutionnelles
  • La culture : valeurs collectives, normes, représentations, visions d’avenir
  • Les pratiques : routines productives, comportements, manières d’être...

Les transitions sont des processus complexes. Il apparaît donc illusoire de tenter de les prévoir et de les piloter. À condition d’accepter l’imprévu, le conflit, la diversité et l’incertitude, il est en revanche envisageable d’influencer, voire d’orienter ces processus. C’est tout l’enjeu des démarches de prospective.

Rappel de quelques notions essentielles

Adaptabilité : un système complexe peut s’ajuster lui-même en réponse à son environnement. Proche de la résilience : capacité d’un système à affronter des perturbations extérieures tout en préservant sa structure fondamentale.
Auto-organisation et émergence : des propriétés et des structures cohérentes apparaissent sans planification ni impulsion extérieure.
Récursivité : les éléments modifient collectivement leur environnement, qui en retour
va modifier leurs états ou comportements possibles.
Conséquence de ces caractéristiques : connaître les propriétés et le comportement des éléments d’un système complexe ne suffit pas pour prédire le comportement global du système.
Co-évolution : un système évolue avec son environnement et fait évoluer son environnement. Cela revient à dire qu’un système fait (presque toujours) partie de systèmes plus larges et intègre (presque toujours) des structures qui fonctionnent comme des sous-systèmes.